COMMUNIQUE FINAL

 

 DE LA 3EME SESSION EXTRAORDINAIRE

DE LA CONFERENCE ISLAMIQUE AU SOMMET

 

SUR LE THEME :

 

"RELEVER LES DEFIS DU 21EME SIECLE: LA SOLIDARITE DANS L'ACTION"

 

MAKKAH AL-MUKARRAMAH

 

5 ET 6 ZUL QAADA 1426 H

7 -  8 DECEMBRE 2005

 

 

 

En réponse à l'aimable invitation adressée par le Serviteur des Deux Saintes Mosquées, le Roi Abdullah Bin Abdelaziz à ses frères et sœurs dirigeants de la Oummah islamique, la 3ème session extraordinaire de la Conférence islamique au Sommet s'est tenue les 5 et 6 Zul Qaada 1426 H (7 et 8 décembre 2005) à Makkah Al-Mukarramah.

 

Les travaux ont été ouverts par la récitation de versets du Saint Coran suivie  du discours du Serviteur des Deux Saintes Mosquées, le Roi Abdullah Bin Abdelaziz qui a réaffirmé que « le fidèle qui trouve sa force en Dieu ne désespère pas de Sa Miséricorde. L’unité islamique ne sera jamais réalisée par l’effusion de sang, comme le prétendent les égarés. Ni l’excès, ni l’extrémisme, ni le Tafkir ne peuvent prospérer sur une terre fécondée par l’esprit de tolérance, de modération et de juste milieu ».

 

Sa Majesté a ensuite exprimé l’espoir de voir, un jour, « une Oummah islamique unifiée, une nation qui aura éliminé l’injustice et l’oppression, un développement islamique global visant à éliminer l’indigence et la pauvreté et à répandre les principes de juste milieu qui concrétisent la tolérance islamique, des inventeurs et des industriels musulmans, une technologie islamique avancée et une jeunesse oeuvrant pour ce bas monde comme elle œuvre pour l’au-delà ».

 

La Conférence a également suivi le discours prononcé par le Premier Ministre malaisien, Son Excellence Dato Seri Abdullah Bin Ahmed Badawi, en sa qualité de Président de la 10ème session de la Conférence islamique au sommet. Dans son discours, le Premier Ministre malaisien a souligné que la Oummah ne pouvait plus se cantonner dans l’immobilisme et que les causes de la situation pitoyable où elle se trouve engluée aujourd’hui doivent être prises à bras le corps et appréhendées de manière holistique, notamment, par le renforcement des capacités et la projection de la véritable image de l’Islam et des ses approches civilisationnelles. Il a par ailleurs annoncé que la Malaisie se propose d’organiser des réunions en vue de délibérer sur la  bonne gouvernance et la mise en place d’un mécanisme d’intervention de réaction rapide pour atténuer l’impact des catastrophes naturelles dans les Etats membres de l’OCI. 

 

Son Excellence le Professeur Ekmeleddin Ihsanoglu, Secrétaire Général de l'Organisation de la Conférence Islamique a également prononcé une allocution dans laquelle il a évoqué la situation qui prévaut actuellement au sein de l'OCI et fait état de l'ambition de celle-ci à occuper une place de choix sur la scène internationale en ayant à l'esprit les développements importants que connaît l'ordre mondial et la nécessité d'élaborer un plan stratégique pour se hisser à la hauteur de ces développements d'une manière qui puisse préserver les intérêts supérieurs du monde musulman et permettre de sauvegarder l'identité, la civilisation et les valeurs humanistes sublimes de la Oummah qui constituent un facteur essentiel pour la cohésion des communautés  musulmanes et le renforcement de leur stabilité sociale.

 

Après avoir pris connaissance des rapports et des recommandations soumis par la réunion ministérielle préparatoire de la session extraordinaire, et examiné les points inscrits à son ordre du jour, la Conférence a décidé d'adopter la Déclaration de Makkah, le Rapport  du Comité des Eminentes Personnalités et le Programme décennal pour faire face aux défis qui se posent à la Oummah islamique  et a proclamé ce qui suit:

 

I. Dans le domaine intellectuel

 

La Conférence a réaffirmé que l'Islam est la religion du juste milieu et rejette la surenchère, l'extrémisme et le dogmatisme. A ce propos, elle a souligné l'importance de combattre, par tous les moyens, l'idéologie déviationniste tout en développant les programmes scolaires de manière à raffermir les valeurs islamiques de l'entente, de la tolérance, du dialogue et du pluralisme.

 

La Conférence a affirmé que le dialogue des civilisations, fondé sur le respect et la compréhension mutuels et sur l'égalité entre les peuples, est nécessaire pour bâtir un monde de tolérance, de coopération, de paix et de confiance entre les nations.

 

La Conférence a appelé à combattre l'extrémisme religieux et idéologique et à s'abstenir de taxer d'apostasie les fidèles des différentes écoles de pensée islamiques. Elle a souligné la nécessité d'approfondir le dialogue entre ces écoles et de renforcer l’esprit de la modération, de juste milieu et de tolérance et a condamné ceux qui ont l'audace de délivrer des fatwas sans avoir les aptitudes requises.

 

La Conférence a réaffirmé l'importance  de réformer l'Académie Islamique du Fiqh afin d'en faire une instance de référence pour la Oummah dans le domaine du droit musulman.            

        

 II. Dans le domaine politique

 

La Conférence a réaffirmé l'importance de la question palestinienne considérée la cause centrale de la Oummah islamique. Ainsi, la cessation de l'occupation, depuis 1967, des territoires arabes et  palestiniens, y compris Jérusalem Est, le Golan syrien et le reste des territoires libanais encore sous occupation conformément à la résolution n°425 du Conseil de Sécurité, est une exigence fondamentale de toute la Oummah; ceci étant de nature à unifier la position islamique concernant le règlement global de la question palestinienne conformément aux résolutions des Nations Unies, à l'Initiative arabe de paix et à la Feuille de route. De même, des efforts doivent être déployés pour récupérer la ville d'Al-Qods, préserver son cachet islamique et historique, mobiliser les ressources nécessaires pour sauvegarder et protéger la Mosquée Al-Aqsa et les autres lieux saints, faire face à la politique de judaïsation de la ville sainte, soutenir les institutions palestiniennes qui se trouvent dans la ville et y construire l'université Al-Aqsa. Elle a appelé au soutien du Waqf du Fonds d’al-Qods pour que tout Musulman y participe pour le montant d’un dollar à ajouter à la participation des Etats membres, afin de préserver les lieux sacrés d’al-Qods en premier lieu, la Mosquée d’al-Aqsa, de sauvegarder les monuments historiques de la ville sainte, ainsi que son cachet arabo-islamique et de renforcer la résistance de ses habitants, de manière à ce qu’elle devienne la cité de la coexistence et de la tolérance, en tant que capitale de l’Etat de Palestine. La Conférence a souligné la nécessité de coopérer avec la communauté internationale pour contraindre Israël à stopper la colonisation et à démanteler les implantations dans les territoires palestiniens et le Golan syrien occupés, ainsi que l'arrêt de la construction du mur de séparation et le démantèlement des parties déjà construites conformément à l'avis consultatif rendu par la Cour internationale de Justice.

 

La Conférence a examiné les derniers développements de la situation en Irak. Elle s'est félicitée de l'initiative arabe de réconciliation nationale entre les différentes factions irakiennes et a exprimé le vœu que les prochaines élections législatives déboucheront  sur la mise en place d'un gouvernement irakien constitutionnel de manière à préserver l’unité et l’intégrité territoriales de l’Irak et sa sécurité et sa stabilité politique et à permettre à ce pays de jouer son rôle civilisationnel sur la scène arabe, islamique et internationale. La Conférence a également condamné le terrorisme dont est victime le peuple irakien et exprimé son appui au processus politique, au parachèvement des institutions constitutionnelles et aux opérations de restructuration du pays. Elle a réaffirmé l'importance du  rôle des Nations Unies et de la coopération entre l'OCI et l'ONU pour soutenir le processus de paix en Irak.

 

La Conférence a réaffirmé son appui au droit et aux aspirations du peuple du Jammu et Cachemire à l'autodétermination, conformément aux résolutions pertinentes des Nations Unies, et a appelé au respect des droits humains du peuple Cachemiri. La Conférence a également approuvé l'octroi d'un appui politique et diplomatique aux représentants authentiques du peuple cachemiri dans leur lutte contre l'occupation étrangère.

 

La Conférence a réaffirmé sa solidarité avec le gouvernement somalien dans ses efforts pour le rétablissement de la sécurité et la reconstruction du pays.

 

La Conférence a réitéré sa condamnation de l'agression continue de la République d'Arménie contre la souveraineté et l'intégrité territoriale de la République d'Azerbaïdjan et a appelé au retrait complet et inconditionnel des forces arméniennes de tous les territoires azéris occupés.

 

La Conférence a exprimé sa solidarité avec le peuple chypriote turc musulman et son droit légitime en réaffirmant les résolutions adoptées par les Conférences islamiques concernant Chypre et à travers le soutien des efforts déployés dans le cadre des Nations Unies en vue de trouver une solution globale, équitable et durable au conflit, sur la base de l'égalité politique, ainsi que l'adoption de mesures concrètes pour l'élimination de tous les obstacles qui concourent à l'isolement du peuple chypriote turc. La Conférence s'est félicitée une nouvelle fois de l'accord de paix global au Soudan. Elle a salué la décision prise par le 10ème Sommet de créer un Fonds pour la reconstruction des zones dévastées par la guerre au Soudan et a exhorté les Etats membres à y contribuer généreusement.

 

La Conférence a réaffirmé l'engagement à faire preuve de sérieux et de crédibilité dans l'action islamique commune à travers la mise en œuvre effective des résolutions adoptées par les conférences islamiques, s'agissant nomment de l'affirmation de la solidarité islamique pour faire face aux difficultés engendrées par les catastrophes naturelles et autres ainsi qu'aux menaces extérieures qui ébranlent la sécurité de chacun des Etats membres de l'Organisation de la Conférence Islamique et ce, en adoptant une position commune et en rejetant les sanctions unilatérales. Elle a également réaffirmé la nécessité de réformer l'Organisation de la Conférence Islamique de manière à renforcer l'efficacité de ses institutions et à consolider son rôle.

 

La Conférence a mis l'accent sur la nécessité de condamner le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations, de rejeter toute justification ou légitimation de ce phénomène et a proclamé sa solidarité avec les Etats membres qui ont été victimes et continuent à être victimes du terrorisme, et d'incriminer toutes les pratiques terroristes et les diverses formes d'appui, de financement et d'incitation au terrorisme et ce, en considérant qu’il constitue un phénomène international que l'on ne saurait lier à une religion, à une race, à une couleur ou à un Etat. Elle a souligné la nécessité de mettre en œuvre les recommandations adoptées par la Conférence internationale sur la lutte contre le terrorisme, tenue en 2005 à Riyad, y compris celle relative à la création d'un centre international de lutte contre le terrorisme. Elle a, en outre, réaffirmé la nécessité de faire la distinction entre le terrorisme et la résistance légitime contre l'occupation étrangère qui n’est pas compatible avec l’effusion du sang des civils innocents, et d’intensifier les efforts visant l’adoption d’un code international de conduite pour la lutte contre le terrorisme international et convoquer une conférence internationale ou une session spéciale de l'Assemblée générale des Nations Unies afin de réaffirmer le consensus international sur la mise au point d'une stratégie globale de lutte contre ce phénomène dangereux.

 

La Conférence a insisté sur la nécessité de mener une action concertée pour mettre en évidence le vrai visage de l’Islam et ses nobles valeurs et combattre l’islamophobie et l’atteinte à son image et à ses valeurs et la profanation des lieux saints de l’Islam. Elle a appelé à œuvrer de concert avec les Etats, les institutions et les organisations régionales et internationales pour criminaliser ce phénomène qui est une forme de racisme.

 

La Conférence a exprimé sa préoccupation face à la montée des sentiments de haine contre les Musulmans et l’Islam et condamné les atteintes à l’image du Prophète dans les médias de certains pays. Elle a souligné la responsabilité incombant à tous les gouvernements d’assurer le respect total de toutes les religions et des symboles religieux et de veiller à ce que la liberté ne soit pas utilisée pour porter atteinte aux religions. 

 

La Conférence a insisté sur l'importance de renforcer la coopération, le dialogue avec les Etats non membres de l'Organisation de la Conférence Islamique où vivent des communautés musulmanes ainsi que leurs représentations légitimes de manière à préserver leurs droits. Elle a souligné la nécessité de continuer à suivre de près l'évolution de la situation.

 

La Conférence a appelé à étudier la possibilité de créer un organe indépendant permanent en vue de renforcer les droits de l'homme dans les Etats membres et d'examiner la possibilité d'adopter une charte des droits de l'homme en Islam, conformément aux dispositions de la Déclaration du Caire sur les droits de l'homme en Islam. Elle a également appelé à l'interaction dans ce domaine avec les Nations Unies et les autres organisations compétentes et souligné l'importance du renforcement des droits de la femme y compris son devoir à l’éducation et s'est félicitée de l'offre de la Turquie d'organiser la première conférence de l'OCI sur la Femme.

 

La Conférence a réaffirmé la nécessité, pour les organes d'information du monde musulman, de présenter la véritable et radieuse image de la foi islamique et d'agir d'une manière efficace avec les médias internationaux pour parvenir à cet objectif. Elle a également appelé à réactiver le Comité permanent pour l’Information et les Affaires culturelles (COMIAC) et a souligné l'importance de soutenir le fonds de solidarité numérique afin de promouvoir la société de l'information dans les pays islamiques.

 

III. Dans le domaine économique et social

 

La Conférence a souligné l'importance d'utiliser de manière optimale les ressources humaines, naturelles et économiques dont dispose le monde musulman, de se servir de ces ressources pour renforcer la coopération entre ses Etats, d'agir pour la mise en œuvre du plan d'action visant à développer cette coopération, d'étudier la possibilité de créer une zone de libre échange entre les Etats membres, d'adhérer aux accords conclus et de les appliquer, et de soutenir les activités du Comité Permanent pour la Coopération Economique et Commerciale (COMCEC).

 

La Conférence a réaffirmé la nécessité d'accroître de manière substantielle le volume du commerce entre les Etats membres et s'est félicitée de la création de la Société Islamique Internationale pour le Financement du Commerce et ce, en réponse à l'appel lancé par le Serviteur des Deux Saintes Mosquées lors de la 10ème session de la Conférence Islamique au Sommet et invitant à diligenter le démarrage des activités de la Société. Elle a également appelé à augmenter le capital de la Banque Islamique de Développement pour répondre aux besoins des Etats membres tout en mettant en exergue le rôle vital du Secteur privé dans le développement.

 

La Conférence a réaffirmé l'importance de la coopération dans le domaine du renforcement des capacités, de l’éradication de la pauvreté, le chômage, l'analphabétisme, l'éradication des maladies, notamment le Sida, la poliomyélite et la tuberculose,  d'oeuvrer à la mobilisation des ressources nécessaires à cet effet, à travers  la création d'un Fonds spécial auprès de la Banque Islamique de Développement et de charger le Conseil des Gouverneurs de la Banque de mettre en œuvre cette décision.

 

Evoquant l'appel lancé par le Secrétaire général des Nations Unies ainsi que celui du Secrétaire général de l’OCI et les résolutions islamiques pertinentes en faveur de l'éradication de la poliomyélite, la Conférence a souligné l'importance de soutenir les efforts internationaux dans ce domaine surtout que les Etats membres comptent parmi les principales victimes de la polio.

 

La Conférence a appelé à soutenir le développement en Afrique et l'initiative du NEPAD et a décidé de mettre en place un Programme spécial à cet effet. Elle a réitéré l'engagement à réaliser les Objectifs de Développement du Millénaire à travers la prise de mesures appropriés pour éradiquer l'impact de la pauvreté dans les Etats membres. Elle a invité les Etats et les institutions internationales qui ont les moyens de réduire ou d'annuler les dettes des Etats membres à envisager cette possibilité afin de leur permettre de réaliser le développement économique et d'éradiquer le poids de la pauvreté. Elle a aussi encouragé les initiatives prises par les Etats membres pour renforcer la coopération économique avec les autres Etats membres, les pays les moins avancés et les pays à faibles revenus, membres de l'Organisation de la Conférence Islamique.

 

La Conférence a décidé de prendre des mesures claires visant à promouvoir le développement scientifique et technologique notamment dans le domaine de l’autosuffisance telles que l’utilisation pacifique de la technologie, dans le cadre de l’Agence internationale de l’Energie atomique (AIEA) pour soutenir le développement durable des Etats membres de l'Organisation de la Conférence Islamique.

 

Elle a souligné l'importance des résolutions et des recommandations adoptées au Sommet Mondial de la Société de l'Information organisé à Tunis et a appelé à réduire le fossé numérique entre les Etats et à réaliser le progrès civilisationnel souhaité. Elle a également préconisé une coopération étroite dans le domaine des sciences et de la technologie.

 

La Conférence a adressé l'expression de ses remerciements et de sa considération au Royaume d'Arabie Saoudite pour sa généreuse hospitalité et pour le soutien incessant apporté par le Royaume à l’Organisation de la Conférence islamique et son Secrétariat général. Elle a exprimé sa considération au Secrétaire général de l'OCI pour ses efforts soutenus visant à instaurer un esprit et une vision nouvelle d’efficacité et d’efficience dans le travail de l’Organisation ainsi que sa profonde appréciation des efforts déployés par les membres du personnel du Secrétariat général pour le professionnalisme et l'abnégation dont ils font preuve et pour s’être acquittés des tâches qui leur sont assignées en un temps record.