RAPORT DU SECRETAIRE GENERAL SUR  LA QUESTION DE LA PALESTINE ET D’AL-QODS AL-CHARIF

 

 PRESENTE A LA 3ème SESSION EXTRAORDINAIRE

DE LA CONFERENCE ISLAMIQUE  AU SOMMET

 

MAKKA AL MOUKARRAMA

ROYAUME D'ARABIE SAOUDITE

 

5 - 7 DHOULGHIDA 1426 H

6 - 8 DECEMBRE 2005

 

 

La situation dans les territoires palestiniens

 

Ces derniers temps, la question palestinienne a connu d’importants développements avec la mise en œuvre par le gouvernement israélien de son plan unilatéral relatif au redéploiement de ses forces à l'extérieur  de la Bande de Gaza, le démantèlement de toutes les colonies de Gaza et le départ de leurs occupants et d'autres colons établis en Cisjordanie. Le Secrétaire d'état américain aux affaires étrangères a déployé des efforts qui ont abouti à un accord israélo palestinien au sujet des points de passage sur la voie terrestre reliant l'Egypte à Gaza et le passage sûr entre  celle-ci et la Cisjordanie.

 

En dépit de l'atmosphère positive ayant suivi le retrait israélien du secteur de Gaza, Israël a récemment pris des mesures visant à créer, au Nord de Gaza, en territoire palestinien, une zone tampon large de quelques centaines de mètres.  Les forces israéliennes ont poursuivi le pilonnage de plusieurs régions du secteur de Gaza aux canons, aux chars et à l'aviation, faisant des dizaines de martyrs et de blessés. Le représentant du Quartet, James Wolfensohn, a critiqué les mesures israéliennes et a dit qu'Israël se comportait comme si l'évacuation de Gaza n'avait pas eu lieu, révélant en outre que l'état hébreux a demandé l'arrêt de l'étude préliminaire entreprise par la Banque mondiale pour relier le secteur de Gaza à la Cisjordanie.

 

Israël poursuit ses incursions dans les villes, les villages et les camps de réfugiés en  Cisjordanie occupée; il a commis de nouveaux massacres des populations et lancé des campagnes d'envergure; il maintient les sanctions collectives contre les citoyens palestiniens. Israël poursuit l'implantation des colonies, la construction de routes de contournement, du mur de séparation et l'installation des barrages militaires qui entravent la circulation des populations. Israël a en outre a réservé, en Cisjordanie, de nombreuses routes à l'usage exclusif des colons juifs et interdites aux palestiniens, ce, dans le cadre d'un plan de séparation raciste révélé récemment et ayant pour objectif de créer une nouvelle réalité sur le terrain. Ce plan prévoit la confiscation de vastes superficies des terres palestiniennes afin de créer de nouvelles routes pour les seuls juifs et d'ériger des passages, des portails et des postes de contrôle pour surveiller la circulation des palestiniens qui n'auront pas accès à ces routes.

Pertes économiques

 

Le Centre national palestinien d'information a publié un  rapport qui indique que la valeur des pertes subies par l'économie palestiniens depuis le déclenchement de l'Intifada s'élève à 15 milliards 633 millions de $ à cause des mesures israéliennes, notamment, le blocus, les sanctions collectives, les bombardements, la destruction des infrastructures et des propriétés publiques et privées. Selon le rapport le PIB a baissé de 40 %,  les exportations de 54%, le volume des investissements de 145 millions de $, la hausse du taux de chômage est passé de 10 % avant l'Intifada à 27%. Le rapport indique encore que 67% des familles palestiniennes ont perdu la moitié de leurs revenus. Les opérations militaires israéliennes ont endommagé plus de 9.000 usines dont 430 ont été totalement détruits. 1720 établissements économiques palestiniens ont été fermés par suite de la construction du mur de séparation. La main-d'œuvre palestinienne qui ne peut accéder aux lieux de travail à cause du mur et du blocus imposé aux villes et villages, a perdu 3 milliards, 800 millions $. Les pertes du revenu net et du PIB s'élèvent à 9 milliards 163 millions $.   

 

La colonisation et le  mur 

 

Bien qu’il ait évacué le totalité des colonies de Gaza et quatre autres colonies au nord de la Cisjordanie, Israël n’en continue pas moins d’agrandir les colonies existant en Cisjordanie. On a ainsi récemment découvert un accroissement notable du nombre de colons en Cisjordanie qui est passé à plus de 260.000 en août 2005 pour la seule Cisjordanie et à plus de 180.000 vivant dans onze quartiers de colonisation éparpillés à l’intérieur et autour de la partie est de la ville d’Al-Qods, occupée depuis 1967.

 

Récemment, les activités de colonisation israélienne en Cisjordanie se sont étendues à la confiscation de vastes superficies de terres palestiniennes pour agrandir la colonie de Ramat Yache, située au cœur de la ville d’Al-Khalil. On vient d'apprendre que le couvre-feu permanent et les sanctions collectives imposées aux citoyens palestiniens de la ville d’Al-Khalil ont conduit au renvoi, hors de leurs foyers, de 30.000 palestiniens qui vivaient dans la partie ancienne de la cité. Leurs maisons ont été confisquées et y ont été remplacés par des milliers de colons amenés de l'extérieur. Il s'agit là d'une opération de nettoyage ethnique qui vise à judaïser la ville d’Al-Khalil et à imposer des réalités empêchant la création d'un état palestinien indépendant.

 

Israël a également confisqué des terres pour construire une route de contournement reliant un certain nombre de colonies situées au Sud-ouest de la ville de Kalkilya. D’autres terres ont également été confisquées pour l’agrandissement de la colonie de « Annab » implantée à Toulkarem. Il s’y ajoute la confiscation de centaines d'hectares de terres à Naplouse et Bethléem pour la construction de nouvelles parties du mur de séparation raciale. L’autorité nationale palestinienne a publié un rapport indiquant que les activités de colonisation avaient enregistré un accroissement de 100% durant le mois de juillet par rapport au mois de juin. Certaines informations ont révélé dernièrement que le gouvernement israélien avait décidé de renforcer la colonisation à Ghour-al-Ordon et qu’une enveloppe de 20 millions de dollars avait été dégagée pour un projet de colonisation à réaliser en 2005-2006.

 

Pendant ce temps, les travaux de construction du mur de séparation, se sont poursuivis et ont même vu leur cadence s’accélérer. De nouveaux pans du mur ont été construits, surtout autour d’Al-Qods occupée, pour faire de la colonie de Maalih Adoumim, dont le périmètre dépasse la superficie de Tel Aviv, une véritable ville par la confiscation de 12.000 hectares de terres Cisjordaniennes à annexer au territoire de la municipalité artificiellement créée.

 

Les autorités israéliennes ont parachevé  la construction de la plus grande partie du tracé du mur au sud de la ville d’Al-Qods, en laissant les agglomérations de Bethléem et Bethjala derrière une clôture haute de 11 mètres,  en expropriant des milliers d'hectares de terres palestiniennes et en transformant la ville natale du Messie en une ville fantôme complètement coupée d’Al-Qods. Les autorités occupantes ont également transformé la mosquée Bilal Ibn Rabah à Bethléem  en une synagogue et l’ont annexée à Israël.

 

Au nord de la ville occupée d’Al-Qods, Israël a parachevé la construction de nouvelles parties du mur en isolant complètement les villages palestiniens qui sont ainsi transformés en de véritables bantoustans entourés de clôtures infranchissables des quatre côtés. Israël est en passe de parachever la reconversion du barrage militaire de Kalendia, en un point de passage frontalier permanent qui coupe la ville d’Al-Qods de son environnement palestinien. Le chef du gouvernement israélien a récemment déclaré qu'Israël est déterminé à poursuivre l'implantation des colonies en Cisjordanie et au Golan et à parachever la construction du mur de séparation.

 

La ville d’Al-Qods

 

Israël a maintenu le blocus de la ville d’Al-Qods occupé. Il continue à en interdire l’accès aux palestiniens de Cisjordanie et de Gaza et à imposer des restrictions draconiennes à l’accès des fidèles à la mosquée d’Al-Aqsa. Les palestiniens de Cisjordanie et de Gaza ont été empêchés d'accéder à la mosquée et d'y prier pendant le mois béni de Ramadan.

 

Dans le cadre des tentatives israéliennes visant à modifier les monuments  de la ville d'Al Qods occupée et de s'immiscer dans les affaires des waqfs islamiques en vue d'étendre leur domination sur les monuments  islamiques, la direction israélienne de l'archéologie a publié un rapport dans lequel elle prétend que les murs entourant la cité sainte subissent une fissuration dangereuse qui pourraient en provoquer la chute en grande partie. La direction des waqfs islamiques a répondu que le rapport israélien cache la volonté des autorités d'occupation d'intervenir dans les travaux de réfection des monuments  historiques au service des intérêts d'Israël par la judaïsation de la ville et la modification de ses monuments.  Le Secrétaire Général de l'Organisation de la Conférence Islamique a rendu public, le 20 novembre 2005, un communiqué de presse  sur la situation actuelle des lieux saints et des monuments historiques dans la ville d'Al Qods Acharif, en raison des mesures israéliennes et des fouilles entreprises par les autorités d'occupation au dessous de la Mosquée Al Aqça et des murs entourant la cité ancienne. Le Communiqué réaffirme que l'Organisation de la Conférence Islamique est disposée à faire le nécessaire pour préserver l'identité islamique de la ville d'Al Qods Acharif, reconstruire et entretenir ses monuments religieux et historiques.

 

La Cour suprême d'Israël a permis en octobre dernier à un groupe d'extrémistes juifs de pénétrer dans la Mosquée Al Aqça et d'y prier et ce, pour la première fois depuis 1967. Cet acte israélien intervient après l'annonce faites à maintes reprises par les groupes d'extrémistes juifs de leur intention de profaner la destination du voyage nocturne du Prophète (Prière et Salut d'ALLAH sur Lui) et de l'attaquer aux missiles.

 

Israël a également poursuivi de plus belle ses tentatives de judaïsation de la ville occupée d’A-Qods et de modification de ses composantes culturelles, géographiques et démographiques. Il a parachevé la construction de 70% du mur qui place la ville dans un étau de 130 kilomètres de long et va intégrer une vingtaine de colonies tout en coupant 250.000 habitants de la partie est d’Al-Qods  de leur milieu géographique et démographique naturel et en transformant Al-Qods en une agglomération de quartiers pauvres et isolés.

 

D’un autre côté, la colonisation israélienne a redoublé d’intensité à l’intérieur même de la ville sainte. Ainsi, l'association de colonisation appelée "Association pour le développement de l'ancienne Cité", vient d'enregistrer 1300 domaines appartenant à des palestiniens au nom de juifs afin de judaïser la ville sainte. Il a été aussi annoncé récemment que le gouvernement israélien a alloué un budget de 15 millions de dollars au renforcement de la colonisation juive à Al-Qods dans le cadre d’un plan visant à créer des colonies israéliennes et à enrayer la croissance démographique palestinienne. Il s’agit, entre autres, de construire un parc de loisirs et des centres touristiques dans la périphérie de la ville sainte dont un sur le versant du mont des oliviers, de reconvertir en théâtre la « grotte de Salamon», où les colons ont implanté une colonie et de construire une route reliant les foyers de colonisation intra-muros aux grandes implantations situées dans la périphérie de la ville.

 

 La tentative d'Israël la plus grave, dans le cadre de judaïsation de la ville sainte est la décision du  gouvernement d'allouer 100 millions de $ pour la réfection des bâtiments et des routes de la ville d'Al Qods Acharif occupée et y mettre en relief l'architecture juive.  

 

En outre, la municipalité de l’occupation israélienne à Al-Qods a autorisé le lancement d’un nouveau plan de colonisation comprenant  une centaine de logements et un hôtel pour les juifs dans le secteur de Jebel Al-Mokabar au sud-est d’Al-Qods. Le projet s'étend sur 48 mille m2, dont la moitié sera réservée à la construction d’une synagogue et de logements et le reste à un hôtel qui surplombe la partie sud est de la ville.

 

Plus récemment, Israël a fait part de son intention de créer un autre foyer de colonisation au cœur de Bab Al-Sahirat, situé à l’extérieur des remparts de la vieille ville et d’y ériger une synagogue surmontée d’un dôme en or pour rivaliser avec le fameux Dôme du Rocher, tentant ainsi de judaïser la ville sainte, non seulement géographiquement et démographiquement parlant, mais aussi culturellement. De surcroît, les autorités occupantes ont émis des ordres de démolition de plus de 120 maisons palestiniennes du village de Salwan, situé au sud des remparts, sous prétexte d’aménager un parc de loisirs et de sauvegarder de prétendus vestiges juifs.

 

Démarches politiques

 

La récente escalade israélienne a porté un coup sévère aux efforts de paix déployés au niveau international et tempéré les espoirs palestiniens quant à la progression du processus de paix. La région a connu de nombreuses activités politiques. C'est ainsi que le président Mahmoud Abbass s'est rendu dans certaines capitales européennes et arabes ainsi qu'à Washington où il a rencontré le président Bush, dans le cadre de l'action au service de la cause palestinienne.

 

En application des termes du communiqué final sanctionnant la 32ème  session de la Conférence islamique des Ministres des affaires étrangères tenue à Sanaa, la délégation ministérielle islamique composée du Maroc, du Yémen, du Sénégal, de la Malaisie, de la Turquie, de la Palestine et du Secrétaire Général de l'Organisation de la Conférence Islamique a eu des rencontres avec le membres du Quartet, au siège des Nations Unies à New York, en marge de la 60e session de l'Assemblée Générale de l'ONU. La délégation a rencontré les Secrétaire Général  de l'ONU, Kofi Anaan, le Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, Sergueï Larov et le haut représentant de l'Union Européenne, chargé de la politique étrangère et de la sécurité, Javier Solana. Les entretiens avec ces responsables ont été axés sur la cause d'Al Qods Acharif et les dangers qui menacent la ville sainte. La délégation a tenu à leur rappeler que la  cause d'Al Qods est la cause centrale de l'Organisation de la Conférence Islamique, une cause internationale qui intéresse tous les pays du monde. La délégation a demandé, lors de ces rencontres que tout soit fait pour arrêter les agressions israéliennes contre la Cité, lever le blocus qui lui est imposé, rejeter les mesures israéliennes visant à la judaïser et à modifier ses monuments, arrêter la construction du mur de séparation et les actes d'implantation coloniale, y compris la fusion entre la colonie de Maalih Adomim et la ville d'Al Qods qui intervient avant les négociations sur le statut final et crée une réalité préjudiciable à l'établissement d'une paix juste au Moyen Orient. La délégation ministérielle islamique va poursuivre sa mission par de nouveaux contacts à Washington, à Londres et au Vatican.

Visite du Secrétaire général en Palestine

       

Le Secrétaire général a effectué, en mai dernier,  une visite en Palestine où il a rencontré le Président Mahmoud Abbass, son premier ministre, Ahmed Kourei et d’autres ministres et responsables palestiniens. Il a examiné avec eux la situation en Palestine et les moyens de soutenir le Peuple palestinien dans son combat pour recouvrer ses droits nationaux à la liberté, à l'indépendance, à l'établissement d'un état sur son sol.  Le Secrétaire Général  s’est rendu à Al Qods Acharif et dans la Mosquée Al Aqça et pris connaissance des problèmes que vit la ville sainte par suite du blocus et des autres mesures qui lui sont imposés par les occupants sionistes.

 

La situation aujourd'hui est plus grave qu'elle ne le paraît de prime abord. La ville sainte traverse la phase la plus difficile de son histoire et se trouve en état d'agonie à cause de la répression, de l'isolement et du blocage. La présence arabo islamique y est en voie de disparition totale, par suite de la politique de judaïsation, de la création sur le terrain d'un fait accompli qui ne peut être modifié. Pour faire face à cette situation, il faut une politique de confrontation et un programme d'action systématique permettant d'arrêter la judaïsation accélérée qui a pour objectif d'opérer les modifications les plus vastes et les plus profondes possibles.

 

La préservation du caractère arabo islamique d'Al Qods est liée à la sauvegarde de la présence humaine, seule capable d'empêcher la concrétisation du plan israélien. Cela appelle l'amélioration des conditions de cette présence, le renforcement de ses moyens matériels et de sa résistance, la protection des institutions de la ville sainte qui s'assignent cette mission, ce dans le cadre d'un programme systématique de soutien à Al Qods, tenant compte des priorités, en particulier, des besoins fondamentaux, avec en tête, l'habitat, la santé, la culture, la sauvegarde du caractère et de l'identité islamique des lieux.

 

Le Secrétaire Général a discuté avec les responsables palestiniens ce que l'Organisation de la Conférence Islamique, les institutions caritatives et les organes qui en dépendent pourraient faire pour soutenir et renforcer la position de la ville sainte et ses habitants. Il a été convenu à cet égard, que le Centre de recherches sur l'histoire, l'art et la culture islamique (IRCICA, Istanbul) participe aux travaux de réfection de la cité, en collaboration avec l'Université d'Al Qods.

 

Le Secrétaire général soumet le présent rapport à la 3e session extraordinaire de la Conférence islamique au sommet pour décision appropriée.